Dégustation du soir, Martinique

Nouveautés Neisson, la suite

On vous en a déjà parlé il y a quelques temps, la distillerie Neisson a ajouté deux éditions VSOP à son catalogue. Oui mais voilà, ils ne se sont pas arrêtés là et nous ont gratifié de 4 autres nouveautés.
Il y a d’abord la nouvelle mouture de l’Esprit bio dont nous parlerons plus tard. Mais il y a aussi 3 nouveaux rhums « vieux » et les 3 ont en commun de ne pas être recommandés pour toutes les bourses…
Plongeons ensemble dans ces trois annonces avec une compilation des notes de Thomas et de moi-même 😉

1 – Vieux Bio – 52,3%

On le sait, depuis quelques années Neisson a commencé à produire du rhum labellisé bio. Tout a logiquement commencé avec le blanc (52.5 bio), rhum qui a ensuite été mis en vieillissement pour sortir le Profil 105 bio après un peu moins de 2 ans. Mais le temps passe et il restait du rhum en vieillissement, nous permettant aujourd’hui de découvrir le premier rhum « vieux » au sens du cahier des charges de l’AOC, à savoir qui a passé 3 ans révolus en fût.
Celui-ci est présenté dans une bouteille décorée par Philippe Baudelocque, comme les récentes Cuvées Sacha, mais en bouteille transparente cette fois, et sans la grosse boîte en bois ;).
Là où le bât blesse (et pas qu’un peu), c’est au niveau du prix d’annonce. Si le 52,5 bio est sorti autour des 50€ et le Profil 105 bio autour des 80€, ce rhum vieux explose complètement les tarifs avec un prix de vente de 185€… Si vous cherchez une logique, à mon avis c’est du côté du positionnement dans la gamme luxe qu’il faut regarder, parce que personne n’a encore compris comme 1 an de vieillissement en plus faisait plus que doubler le prix par rapport à un Profil 105. Mais bon, faisons abstraction du prix et goûtons-y…

Nez

Voilà un profil plutôt complexe comme Neisson sait les faire. On navigue entre une côté végétal, porté par une présence de l’alcool un peu trop marquée, et un fruité compoté assez gourmand et porté sur les fruits rouges (cerise, fraise, groseille). Le tout est additionné d’un côté toasté assez net, apportant des notes empyreumatiques et pas mal de chocolat (une fois le rhum bien ouvert). Le miel et la cire sont présents, ce qui apparait après les VSOP comme un marqueur récurrent des nouveaux Neisson. Et le boisé dans tout ça me direz-vous? Il est plutôt discret et bien intégré.

Bouche

La première impression n’est franchement pas aussi gourmande que ce que le nez laissait présager.
La première gorgée est clairement sur le boisé, avec de l’amertume, de l’astringence et un alcool de nouveau perceptible. À la deuxième gorgée, le profil s’enrichit. Il est toujours assez végétal et boisé mais se teinte de fruits verts (pomme), d’un peu d’épices (girofle) et de chocolat. Le bois est très présent et écrase un peu le reste malgré le jeune âge du rhum. Du coup ça manque clairement de gourmandise…

2 – XO Full Proof batch 3 – 57,3%

Deuxième sortie dont nous parlerons aujourd’hui, voici venir le 3ème batch du XO full proof. Souvenez-vous, nous avions comparé les deux premiers batchs plus tôt et le batch 2 étant en rupture de stock, il était temps de sortir un nouvel opus.
Neisson reste sur la formule « assemblage » du batch 2 mais en changeant la composition évidemment. Nous sommes donc ici face à 60% de rhum de 2007 ayant vieilli en fût de Cognac et à 40% de rhum de 2012 ayant vieilli en fût de Bourbon. Le tout bien sûr sans réduction et à un tarif que nous qualifierons au maximum de « cohérent » par rapport à celui du batch 2 puisqu’il est de 225€ contre 200€ pour le batch 2, même si de nouveau il est à la hausse.

Nez

Au premier abord l’impression n’est vraiment pas flatteuse. Le nez est sec, légèrement épicé (vanille), herbacé et surtout alcooleux. Du coup on le laisse respirer plus longtemps (il avait déjà respiré avant hein 😉 ) avant d’y retourner. L’aération longue lui permet de s’ouvrir avec le duo miel/cire déjà abordé dans le vieux et les VSOP. Les fruits sont présents, plutôt à chair blanche (pêche notamment) mais aussi cerise et mangue, accompagnés de notes végétales, de vanille et de fumée.

Bouche

Le profil est cohérent avec le nez puisque les marqueurs principaux sont le bois (enrichi de miel et de cire toujours, et légèrement amer), les fruits (pêche notamment, comme au nez) et les épices (piment, cannelle). On ne peut pas dire que la gourmandise soit sa principale qualité tant il est rafraîchi par un côté végétal franc qui me rappelle le sous-bois humide (côté plantes mouillées, pas côté bois mouillé). Dans la longueur je retrouve un côté « lie de raisin » (peau et pépins).

Vu le profil de dégustation, une comparaison avec le batch 1 n’est pas à l’ordre du jour tant le match serait déséquilibré. Un face à face avec le batch 2 en revanche est intéressant.

Bonus: Comparaison batch 3 vs batch 2

Au nez le batch 3 garde sa proéminence végétale, faisant ressortir le côté vin cuit et fruits confits du batch 2. Celui-ci semble plus « lourd » avec un côté qui me rappelle un vieux Cognac boisé.

En bouche on retrouve le même rapport, le batch 2 paraissant plus rond en bouche, plus enrobant avec ce côté vin cuit. Le batch 3 reste très végétal et manque toujours cruellement de gourmandise. Le contraste entre les deux est très marqué et ils n’ont pas grand chose à voir l’un avec l’autre. Le batch 2 semble aussi bien plus marqué par le bois mouillé.

3 – 15 ans batch 3 – 48,7%

Passons à la troisième et dernière bouteille de la soirée, le nouveau batch de Neisson 15 ans. Nous en sommes déjà au batch 3 après un batch 1 issu du millésime 1996 et un batch 2 issu du millésime 2000. Il est ici question d’un rhum issu du fameux millésime 2004 (le même jus que ceux-ci donc, mais plus vieux) vieilli en fût de Bourbon. Niveau prix en revanche on reste consistant avec les batchs précédents puisqu’il est annoncé à 365€ ce qui est une somme, certes, mais aussi le prix moyen auquel on peut trouver le batch 2.

Nez

Là enfin je retrouve un vrai profil Neisson. Le nez est fruité et boisé à la fois. Un beau boisé qui vient soutenir des parfums d’agrumes frais (mandarine, citron bergamote, cédrat) légèrement épicés (gingembre, vanille). Le boisé est également légèrement grillé et teinté d’une pointe de tabac. Les fruits secs complètent (comme souvent chez Neisson) le tableau avec de l’amande et de la noisette. Avec l’ouverture l’acidité/fraîcheur disparait et laisse place à une sucrosité plus gourmande.

Bouche

Cohérent avec le profil olfactif, le boisé est au premier plan, toujours teinté d’agrumes mais plus sucrés cette fois (orange bien mûre). Par contre le bois prend une part plus importante, il est toujours légèrement grillé et les même fruits secs sont présents. Les épices s’orientent plus vers la vanille et une touche de poivre et une petite amertume viennent perturber dans la longueur mais aucun doute, celui-ci c’est du Neisson pure souche.

Conclusion

Une fois n’est pas coutume voilà un article que j’ai eu du mal à boucler. En effet, en grand amateur des rhums Neisson, j’étais très impatient de découvrir ces nouveautés. Puis sont tombés 2 choses: d’abord les prix, complètement prohibitifs pour le vieux bio notamment (ça reste à ce jour totalement incompréhensible), et puis la dégustation, avec deux grosses déception personnelles sur le vieux bio et le xo fp 3. Du coup j’ai voulu voir si ma perception était juste, mais les 2cl des samples de la masterclass ont eu beau y passer, rien n’y faisait. Le vieux bio reste bien trop boisé pour moi qui suis habitué à l’élégance du boisé Neisson, le XO FP reste lui trop végétal pour moi qui ait encore en tête la gourmandise de ce XO FP batch 1 mémorable. Heureusement l’éclaircie dans la grisaille vient du 15 ans qui reste, lui, fidèle aux belles valeurs de la distillerie.
Il me reste à espérer qu’il ne soit pas le dernier d’une vénérable lignée et que ces deux autres nouveautés ne soient que des exceptions dans une gamme pourtant si réussie.

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