Dégustation du soir, Martinique

Neisson XO FP: le duel

2017 est une année qui aura marqué un tournant pour la distillerie Neisson. D’abord parce qu’elle fêtait cette année là son 85e anniversaire. Mais aussi parce que suite à cet évènement, la distillerie a innové sur plusieurs aspects de sa gamme. De la commercialisation de rhum blanc bio à la sortie de la gamme Armada, les nouvelles bouteilles ont fleuri dans la gamme. L’une de celles-ci a ouvert une nouvelle branche dans l’arborescence maison: l’extra-vieux brut de fût, aussi appelé XO FP pour les initiés 😀

Une bouteille, deux versions

Ce nouveau venu a d’abord pas mal intrigué. Relativement peu annoncé, il a surpris par son rapport positionnement tarifaire vs positionnement gamme. En effet, le XO « classique » est déjà présent dans la gamme, aux alentours de 85€ en métropole. Sortir une version « musclée » à un prix plus que doublé (dans les 180€ à la sortie) pouvait donc sembler totalement démesuré. Qui plus est le XO classique titre à 48,5% et ce nouveau « Full Proof » ne monte pas au-delà de 54,2%. La différence de titre se paye cher!

Et puis les bouteilles commencent à arriver et rapidement on trouve la raison de cette différence de prix. Car le XO, appellation référant à un âge minimum, est le plus souvent associé à un assemblage. Mais voilà, ce n’est pas une obligation et de fait, ce premier XO FP est en fait ni plus ni moins qu’un millésimé de 2006. Voilà qui est déjà beaucoup plus intéressant et qui explique le positionnement tarifaire, puisqu’on se retrouve dans la gamme de prix des Neisson millésimés précédents (2004 et 2005).

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Une bonne année plus tard, ce premier batch étant épuisé, Neisson sort un deuxième batch de son XO FP. Et là re-surprise: le prix est presque constant (il augmente et tutoie les 200€ tout de même) mais surtout retour à l’assemblage! En effet, ce deuxième batch qui titre à 50,8% n’est plus issu d’un seul millésime mais est un assemblage des millésimes 2005 (70%) et 2007 (30%). Difficile dès lors de suivre la logique derrière cette appellation XO FP et de prédire le contenu d’un futur batch 3 potentiel mais dans tous les cas je vais me « sacrifier » et les déguster en face à face, histoire de voir ce qu’ils ont dans le ventre 😉

Dégustation

Batch 1

Au nez le profil est nettement vers les arômes fruités « lourds » (au contraire des fruits frais). J’y retrouve des fruits rouges et des fruits des bois, notamment du cassis, de la myrtille et de la cerise. Le tout se déploie sur fond de vanille et d’un boisé fin. La réglisse mène la danse des épices de façon intéressante.

La bouche est cohérente avec le nez, avec ce même profil de fruits rouges/fruits des bois. Le boisé est présent mais sans exagération et il passe derrière les fruits. Un peu de grillé marque aussi le palais, ainsi que des noisettes et des amandes torréfiées. C’est très bon et plutôt gourmand.

Batch 2

Le nez est plus discret que celui du batch 1: les fruits sont plus jaunes/blancs, frais, moins lourds. J’y retrouve notamment de la poire, de la pomme, et une petite touche de foin qui apporte de l’acidité. C’est vraiment la fraîcheur qui prédomine et le boisé est « typique Neisson », c’est à dire plutôt fin et orienté bois sec. Les épices complètent le tableau sans que l’une d’entre elles ne tire son épingle du jeu. Le nez est globalement plutôt sec.

En bouche les fruits sont devenus mûrs et plutôt sucrés. On est toujours sur du fruit à chair jaune mais à tendance tropicale maintenant. Ce n’est pas forcément de l’ananas, comme on l’entend classiquement quand on parle de fruits tropicaux mais plutôt un mélange de celui-ci avec de la mangue ou du fruit de la passion. Une sorte de salade de fruits exotiques, homogène et agréable. Attention pas de confusion, on est loin du boisé extravagant d’un jamaïcain, ça reste un Neisson tout en finesse. Le boisé est bien là également et apporte une légère amertume. Une touche de vanille complète le profil et la réglisse vient marquer l’arrière-bouche sur la longueur.

Conclusion

En résumé, on est là face à deux rhums aussi différents que peuvent l’être deux frères. La trame de base est bien présente: ce sont deux Neisson avec tout ce que ça comporte, un boisé fin, une intégration de l’alcool aux petits oignons et un fruité présent. Mais à côté de ça ils sont très différents l’un de l’autre, que ce soit au nez ou en bouche. On préfèrera tantôt la gourmandise du premier et tantôt la fraîcheur du second. En ce qui me concerne ma préférence va clairement au premier batch donc le profil est plus original par rapport au reste de la gamme Neisson. Dans tous les cas le premier batch se trouve encore en boutique et le deuxième batch est même encore commercialisé à la distillerie donc pas de souci pour vous faire votre avis, si ce n’est le budget non-négligeable pour les réunir tous les deux 🙂

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