Après une fin de saison en Martinique, il était temps de repartir sur une nouvelle saison (la sixième déjà) sans traîner, le contexte sanitaire étant favorable. Comme chaque année, les thèmes sont proposés et validés par les membres du groupe et je ne vous ferai pas de grande révélation en vous disant que Hampden a été plébiscité parmi les choix. Du coup on est partis, direction la Jamaïque, histoire de fuir le temps maussade de l’hiver européen 🙂
Je ne vais pas vous refaire la présentation complète de la distillerie, ça a déjà été fait en long en large et en travers un peu partout. Je ne peux que vous conseiller l’article de Cyril « Durhum » Werglaz (les images parlent d’elles-mêmes) en dégustant l’un des rhums dont nous allons parler plus bas, le voyage est assuré! Les notes de cet article sont celles de Cédric L, de François et les miennes, celles de Cédric Sip.

1 – Hampden Estate 8 ans – 46%
Première étape, commençons par la référence la plus accessible et la réelle entrée de gamme chez Hampden Estate: cet assemblage de 8 ans, version réduite. Pas question ici de marks, de millésime ni d’autres détails, nous savons seulement qu’il s’agit d’un assemblage de rhums de 8 ans, passés sur place bien entendu, réduits à 46%. Cette bouteille a été mise sur le marché (avec sa grande sœur « high proof ») pour lancer la gamme officielle de la distillerie, qui jusque là n’embouteillait que très peu de rhum elle-même. Inutile de dire qu’à une soixantaine d’euros, cette bouteille est un must have pour tout débutant dans le rhum, histoire d’ouvrir son horizon avec un rhum facilement trouvable et pourtant très typé.

Nez
Pas de surprise pour celui qui connaît Hampden, le profil est fruité (avec de la banane mûre et de l’ananas) et marqué par les solvants. Un petit côté pâtissier est ajouté au tableau, bref la description classique du profil de la distillerie. Le tout avec délicatesse, sans exagération.
Bouche
Cohérent avec le nez mais avec des ajouts de vernis, de tabac, de menthol et d’une touche d’olive, de nouveau on est pas surpris. La fin de bouche, bien que trop courte, est marquée par l’amande/pâtissier, la vanille et une note de chocolat amer. On notera un manque de gourmandise à nos yeux.
Bref ça fait le job pour entrer dans la distillerie, mais on passera vite à autre chose de plus corsé si on aime ça 🙂
2 – Hampden « The younger » LROK 2016 – 47%
On continue avec un rhum plus jeune, toujours embouteillé par la distillerie même, mais qui cette fois arbore à la fois une année de distillation et un mark. Niveau âge nous sommes donc face à un rhum de 5 ans, distillé en 2016 et vieilli intégralement sur place. Niveau mark il arbore un « LROK », synonyme d’un contenu en esters entre 200 et 400 g/hlpa à la sortie de l’alambic. De quoi commencer en douceur la montée aromatique pour un prix de 55-60€.

Nez
Hyper fruité, on a l’impression qu’on a fait mariner un ananas frais dans la bouteille. Il est plein de gourmandise, à pleine maturité. Derrière on retrouve du solvant, un peu d’amande amère et une note fumée légère.
Bouche
L’ananas est évidemment toujours là mais il fait un pas en arrière pour laisser un peu plus de place aux autres arômes. Une note d’olive par-ci, un boisé léger par-là, une note sucrée pour saupoudrer le tout (entre la mélasse et le miel). Niveau longueur c’est l’olive qui l’emporte.
3 – Hampden Great House 2021 – 55%
On continue avec cette troisième bouteille issue en direct de la distillerie. Retour sur un assemblage mais cette fois-ci le public ciblé est plus spécifique que pour le 8 ans par lequel on a commencé. Le nom de la cuvée (Great House) renvoie à l’habitation principale chez Hampden dont c’est le surnom. Nous goûtons aujourd’hui la version 2021, sachant qu’il y a eu une version 2019 et une 2020. Si ces deux premières versions étaient plus « légères » niveau assemblage (20% HLCF et 80% OWH), cette troisième livrée présente une composition plus intéressante avec un 50% LFCH et surtout 50% <>H. Malheureusement toutes ces informations ne se retrouvent pas sur la bouteille, l’étiquette étant dénuée du moindre détail. Le prix de sortie est déjà plus élevé, juste sous les 100€, mais ne cherchez pas, la spéculation est passée par là.

Nez
On pourrait résumer en disant qu’il suffit de cumuler les notes des deux premiers pour obtenir la note de ce troisième! Il reprend en effet d’un côté l’ananas frais et gourmand, mais en l’adoucissant et en le nappant de solvants. À côté on retrouve un boisé vanillé, agrémenté de petites notes de cuir et d’un fruité léger, presque fleuri.
Bouche
Une fois déposé sur la langue, les derniers doutes s’éclipsent: on est bien chez Hampden. Les solvants sont bien marqués et accompagnés d’une palette pâtissière, du pain grillé à la brioche beurrée. Le boisé présente un peu d’amertume et intègre un fruité plus discret, qui va de l’ananas aux olives, le tout saupoudré d’une note de bonbon acidulé. On n’est pas encore dans l’exubérance des gros Hampden mais on sent qu’on s’en approche.
4 – Navy Island Select Cask 2007 – 51,2%
Quittons maintenant les embouteillages officiels pour plonger parmi les embouteilleurs indépendants. Premier au programme du jour, Navy Island, marque dont les autres embouteillages sont des assemblages jamaïcains (bouteille bleue et verte). Mais ils ont aussi sorti cet embouteillage ci, assemblage de 3 fûts de chez Hampden, distillés en 2007. Dix ans plus tard (vraisemblablement passés en Europe), presque 1300 bouteilles ont été produites et sont toujours disponibles et trouvables autour des 120 €. De quoi se faire plaisir avec une bouteille qui, sans l’indiquer, serait un C<>H…

Nez
On continue la plongée dans les parfums de plus en plus lourds, ici le mélange entre les solvants (vernis, colle à bois), le pâtissier (pâte d’amande) et le fruité (banane verte, ananas vert) s’agrémente d’une note nettement végétale qui apporte pas mal de fraîcheur au profil. Le boisé est peu présent, surtout teinté de vanille et d’une pointe vineuse.
Bouche
Le végétal du nez se retrouve bien en bouche, les fruits sont toujours verts (ananas, olive, citron). Les solvants/vernis sont présents également, tout comme le boisé légèrement vineux qui même s’il est discret reste dans le coin. Dans la longueur l’olive fait un pas en avant et occupe le devant de la scène. Au final voilà une belle surprise, pas parfaite certes, mais qui a le mérite de se trouver encore facilement…
5 – Old Brothers HJF 2002 – 53,6%
On continue avec un des beaux embouteillages sortis pour célébrer les 15 ans du distributeur belge The Nectar. À cette occasion les Old Brothers nous ont préparé un Hampden d’un mark aujourd’hui disparu puisqu’il s’agit d’un HJF. D’après les informations historiques ce mark se retrouverait dans la fourchette actuelle des HLCF. Mais là où ça devient intéressant c’est que ce rhum, distillé en 2002, a passé la presque totalité de son vieillissement en Jamaïque.

Nez
Celui-là il met tout le monde d’accord: wouah! Le nez est riche, pâtissier bien gras, avec un très beau fruité. L’ananas juste mûr côtoie l’orange, la mangue et la vanille pour plus de gourmandise. Le boisé se mêle à la réglisse, au menthol et au miel pour plus de profondeur. Des notes florales viennent compléter le tableau.
Bouche
À l’ananas mûr vont venir s’ajouter de la prune et de la banane au rayon fruits. Le boisé est plus marqué qu’au nez, les solvants plus présents également et le pâtissier reste bien net. Des notes de rancio et d’olive (dans la longueur) viennent terminer de nous convaincre qu’il s’agit d’un très beau rhum (si on fait abstraction du prix).
6 – Swell de Spirits <>H 2011 – 67%
Faut-il encore que je vous présente cet embouteillage Swell de Spirits alors qu’on en a parlé dans l’article dédié au mark <>H? Je ne pense pas, du coup on file à la dégustation qui sera elle aussi plus courte puisqu’elle vient compléter celle de l’article précité.

Nez
Outre l’omniprésent pâtissier et l’ananas repris dans la dégustation précédente il faut ajouter la banane mûre et la mangue au profil. Il reste toujours aussi gourmand, notamment par cette belle brioche beurrée.
Bouche
Toujours ce beau cocktail de fruits, d’olives et d’arômes pâtissiers. La gourmandise ne fait jamais défaut, avec une belle vanille pour venir parfumer la brioche. Notons dans la longueur des notes de cerise et d’amandes . Inutile de dire que la majorité de l’assemblée était sous le charme, surtout que cette fois-ci le prix était raisonnable!
7 – Tasttoe DOK 2009 – 56,6%
Impossible de terminer une dégustation Hampden sans tutoyer les étoiles avec ce qui sort de plus chargé de la distillerie. Ces 3 lettres DOK renvoient à Dermot Owen Kelly-Lawson, distillateur au début du 20e siècle chez Hampden. Le rhum qui nous occupe aujourd’hui a été distillé en 2009 et embouteillé en 2021. Voilà à peu près toutes les infos dont on dispose sur son vieillissement… Il a été sélectionné par Tasttoe (boutique bien connue au plat pays) et est sorti à 56,6% et en 198 exemplaires. Il a été vendu à 105€, de quoi égayer un bar avec du funk jamaïcain !

Nez
Dès le premier contact c’est expressif, et pour cause! Les solvants sont très présents, associés à un ananas gourmand et pourtant pas dénué d’une certaine fraîcheur. Le pâtissier/beurré est bien marqué aussi, et s’agrémente d’une pointe de caramel. L’alcool se manifeste par moments mais le nez reste globalement très agréable, y compris sur la durée.
Bouche
Le profil sur le palais est plus lourd, plus marqué par le bois, l’empyreumatique et des notes fumées. Les olives prennent le pas sur le fruité même si celui-ci reste présent, tout comme les solvants. Une petite acidulée rappelle à Cédric L les bonbons de son enfance par moments. Bref, un DOK, dans tout ce qu’il a de plus clivant tellement les marqueurs sont poussés à leur paroxysme!
Conclusion
Voilà qui clôture cette belle soirée, même si les participants ont encore pu repartir avec l’un ou l’autre samples d’autres beaux Hampden. Est-ce grâce aux circonstances enfin favorables, ou est-ce l’effet du début d’année, toujours est-il que la soirée a été un réel succès, tous les participants repartant avec le sourire, même ceux qui venaient dans l’inconnu du profil Hampden. À l’applaudimètre le Swell de Spirits l’emporte haut la main, son rapport qualité/prix étant tout bonnement imbattable et cette gourmandise de tous les instants. J’en connais qui regrettent amèrement d’avoir laissé passer la commande quand je leur en avait touché un mot 😉 Le HJF Old Brothers est derrière mais pénalisé par son tarif. Dommage car il a vraiment beaucoup de beaux arguments!
Prochain rendez-vous le 25 février pour une Bielle soirée. Voilà qui changera mais devrait là aussi plaire à pas mal de monde 😉

Retrouvez ces rhums sur l’application Rum X: le LROK, le Great House 2021, le Navy Island, le HJF Old Brothers, le Swell de Spirits et enfin le DOK.