Saison 4: 2019-2020, Soirées Amis des Amis du Rhum

S4 E6: Montebello & Reimonenq

Presque cinq mois. Voilà le délai qu’il nous aura fallu pour enfin pouvoir nous revoir et passer cette soirée ensemble. Initialement cette soirée « duel guadeloupéen » aurait dû avoir lieu en avril mais la Covid-19 est passé par là. C’est donc en cette fin du mois d’août que nous avons enfin pu nous réunir, non sans une brouette de mesures sanitaires, une autorisation du conseil communal et j’en passe.
Bref, on y est arrivés et on peut dire que ça en valait la peine!

Au programme de cette soirée donc, un face à face 100% guadeloupéen. Nous avions déjà opté pour ce format lors d’un duel Martinique-Guadeloupe (Saint-James / Damoiseau) et lors d’un duel Nord/Sud Martinique (JM / Trois Rivières). Cette fois-ci nous nous dirigeons vers deux distilleries guadeloupéennes qui occupent un peu moins le devant de la scène mais qui pourtant ont de très jolies choses à proposer.
Dans le coin gauche, Montebello, la distillerie de Petit-Bourg située en contre-bas du volcan, sur Basse-Terre. Celle-ci propose une gamme plutôt fournie en références avec beaucoup d’éditions millésimées. Dans le coin droit, Reimonenq, à moins d’une demi-heure de là, est située sur la partie nord de Basse-Terre et propose une gamme organoleptique très typique et originale.
Nous allons donc les confronter via 4 références plus ou moins équivalentes de chaque côté, qu’elles soient similaires en âge, en gamme ou en positionnement tarifaire. Les notes ci-dessous regrouperont les retours combinés de toute l’équipe (Thomas, Cédric L, Michaël, François et moi-même). Mais trêve de bavardage, passons à la dégustation!

Le programme du jour

1 – Winch 2014 vs Cuvée du centenaire

Nous commençons comme toujours par les blancs, eux qui constituent la base de toute distillerie. Du côté Montebello nous sommes face à la cuvée « Winch ». Aucune indication sur la bouteille mais la fiche technique nous révèle une distillation en 2014 et une cuvée parcellaire monovariétale. Celui-ci a été embouteillé à 50% et à 1250 exemplaires. En face la cuvée du centenaire de la distillerie Reimonenq. Celle-ci a été brassée pendant 15 mois en cuve et a été embouteillée, à l’occasion des 100 ans de la distillerie, à 10.000 exemplaires et au même titre de 50%. Prix moyen de chaque bouteille 30€.

Nez

Le Montebello est une évidence de rhum agricole. La canne fraîche se mêle aux agrumes et autres fruits exotiques (passion, mangue) pour un rhum qui ne peut que donner envie. Les notes d’anis, de poivre viennent enrichir le côté végétal et légèrement teinté de levure pour former un ensemble flatteur.
De l’autre côté le contraste est fort puisque le Reimonenq laisse un seul mot à chaque participant: le caoutchouc. C’est sans aucun doute la plus belle unanimité de la saison sur une dégustation. Avec le temps il va s’estomper et s’enrichir de notes minérales mais aussi de réglisse, de solvant et d’une légère acidité.

Bouche

On retrouve dans le palais du Montebello ce qui nous avait séduit au nez: la fraîcheur et les fruits. Ceux-ci se regroupent principalement derrière le citron qui se sucre légèrement pour adoucir la sensation d’acidité. Quelques épices viennent l’enrichir (du poivre notamment) ainsi qu’une note saline. Thomas tente un parallèle avec certains Longueteau.
Côté Reimonenq le caoutchouc est toujours là mais bien plus acceptable. Le rhum s’exprime en rondeur et en minéralité, avec un profil bien épicé. Quelques notes d’agrumes et de fruits rouges se faufilent par moments mais elles sont bien discrètes.

À l’applaudimètre le résultat est sans appel, 75% des votes sont au Montebello Winch qui, il faut le dire, n’a pas eu de réelle concurrence pour ceux qui aiment le blanc agricole.


2 – Montebello 3 ans vs Reimonenq JR 2012

Passons maintenant aux vieux en débutant par des rhums plutôt jeunes pour le coup. D’un côté le Montebello 3 ans, qui est en fait un assemblage de 70% de 3 ans avec 20% de 8 ans et 10% de 12 ans. Il s’agit d’ailleurs de la seule bouteille de la gamme de vieux qui ne soit pas millésimée chez Montebello.
En face nous avons le Reimonenq cuvée JR 2012, un rhum de 3 ans issu de la fameuse double colonne de la distillerie et nommé en l’honneur de Joseph Reimonenq, fondateur de la distillerie. Les deux ont un titre (42% pour le Montebello, 40% pour la cuvée JR) et un prix similaires (30-35€).

Nez

Commençons par le Montebello qui exprime un nez relativement passe partout dans le sens où on peut y retrouver à la fois du sucre cuit, des fruits (citron et pêche notamment), du végétal (avec la canne, de la vanille et même de l’eucalyptus) et des notes plus « lourdes » (avec un côté toasté et caramel au beurre).
Le Reimonenq lui se fait plus gourmand avec une note boisée mêlée au sirop de grenadine/cerise, des épices/herbes (cannelle, anis, menthe, violette, rose) et des fruits (banane confite, amande, pêche de vigne et un peu d’orange). C’est gourmand et surprenant, même en connaissant le profil organoleptique si typique de la distillerie.

Bouche

Rayon Montebello on a une cohérence avec le nez puisqu’on a un mélange d’arômes classiques. Côté fruits on retrouve le citron et la pêche, avec toujours ce mélange d’épices/herbes, poivre, cacao, vanille et menthol. Un certain côté gras sur le palais fait son apparition, enrichi d’une note saline pour donner un peu plus de consistance à l’ensemble. Quelques effluves de grillé et de fumée viennent conclure la dégustation.
En face, le Reimonenq est lui aussi cohérent. Il est plus sucré sur le palais, presque bonbon/liqueur. C’est pâtissier et gourmand avec de la banane ou de la pêche Haribo, le trio violette/pêche de vigne/rose, une touche de bitter orange et quelques timides notes de boisé.

L’applaudimètre est plus partagé et la gourmandise du Reimonenq l’emporte avec 60 % des suffrages. 1 point partout donc dans le duel 🙂


3 – Montebello 10 ans 2002 vs Reimonenq Cuvée Prestige

On attaque maintenant le cœur de la gamme avec des rhums d’une dizaine d’années. Côté Montebello nous sommes face à un rhum de 10 ans, millésimé de 2002, vieilli en fût de chêne et titrant toujours à 42%. Dans le camp d’en face c’est la célèbre « Cuvée Prestige », cuvée de plus de 9 ans, disponible aussi bien en bouteille « classique » qu’en carafe comme aujourd’hui. Il s’agit donc d’un assemblage de rhums ayant vieilli minimum 9 ans. Nous montons en gamme puisque le prix moyen des deux rhums tourne autour des 70€.

Nez

Comme d’habitude on commence avec le Montebello qui exprime ici un profil que je résumerais en « pain d’épices ». De l’orange caramélisée (avec son zeste), des épices (muscade, girofle) et du pain grillé, presque caramélisé, avec des notes boisées discrètes.
Le Reimonenq, lui rappelle plutôt le massepain, pour rester dans la comparaison pâtissière avec des épices mais plutôt cannelle et poivre, de l’amande, du sucre cuit et des arômes de violette. Les notes de boisé sont là mais tellement intégrées qu’on ne les détecte presque pas.

Bouche

Le profil du Montebello est plus austère que ce que le nez laissait présager avec le sucre cuit (voire cassonade/mélasse) et le boisé qui passent devant les fruits (pomme, groseille, framboise, citron) pour un rhum presque liquoreux en bouche alors que sa finale est presque sèche. Cédric L y retrouve des notes de Calvados.
En face le Reimonenq est un exemple classique de ce que la distillerie peut faire avec un profil toujours aussi « saucé », mélange de boisé, de sirop presque bonbon et fruits confits. L’amande du massepain est toujours là, la violette aussi. Le revers de la médaille c’est que cette avalanche de douceur se traduit pas une finale bien trop timide.

La balance de l’applaudimètre penche cette fois du côté de Montebello qui l’emporte avec 60% des voix, de quoi mener 2-1 avant le dernier duel 🙂


4 – Montebello 14 ans 2000 vs Reimonenq RQL

Last but not least, direction le haut de gamme avec des bouteilles dont le prix tutoie les 200€. Côté Montebello nous avons un rhum millésimé (2000), ayant vieilli 14 ans en fût avant d’être embouteillé brut de fût au titre de 50,6% (4 fûts différents). De l’autre la fameuse cuvée RQL, véritable emblème de la distillerie, est un assemblage de rhums vieillis au moins 10 ans en fût de chêne. Embouteillée à 44%, cette carafe a depuis vu un autre assemblage lui succéder avec des rhums de 18 ans (mais avec un prix à la hauteur puisqu’on parle de 300€)…

Nez

Côté Montebello, le supplément d’alcool est le bienvenu, il aide le rhum a mieux s’exprimer. Les fruits sont de la partie avec une belle base de raisins rappelant les Cognacs/Armagnacs, agrémentée de banane mûre, d’orange et de fruits secs. Le profil est également assez marqué végétal/floral avec une fraîcheur et des notes de thé. L’ensemble est bien équilibré et plutôt doux.
En face le Reimonenq reste sur les même notes générales que les précédents montrant bien sa filiation. Toujours ce côté « bonbon » avec de l’arlequin, de la violette et de la banane, accompagnés de fruits exotiques (goyave) et de cerise au marasquin. Le boisé, plutôt riche, se pare d’épices et de notes de fumée par moments. C’est doux et très marqué Reimonenq!

Bouche

Sur le palais le Montebello laisse fortement ressortir le bois, légèrement toasté/fumé. Les fruits sont là mais en retrait par rapport au nez (et plutôt fruits secs/fruits à coque) même si un petit côté vineux (prune) transparaît aussi. Une touche de poivre blanc relève l’ensemble mais la longueur n’est pas très présente malgré les 50%.
Le Reimonenq est lui aussi plus boisé que ce qui avait été ressenti au nez. En revanche les fruits sont plus présents que sur le Montebello. Les agrumes et la cerise confite se joignent à un côté vineux et à des arômes de frangipane pour un profil presque sucré. Des notes de fumée viennent rappeler par moment un vieux Vermouth rouge/vieux Porto à Cédric L. Là encore la longueur n’est pas folle, même si c’est plus logique vu le côté doux et le titre alcoolique bas.

L’applaudimètre de fin de soirée ayant fait défaut (oups), un applaudimètre à posteriori a élu le Reimonenq vainqueur mais les participants étaient partagés. De quoi tout de même ramener l’égalité sur la soirée avec un match nul 2-2 😉


Conclusion

La première conclusion vient du sentiment de bonheur d’avoir enfin pu se revoir, renouer des liens sociaux autrement que par smartphone interposé et reprendre du plaisir « en live ». On espère fortement pouvoir continuer, l’avenir nous le dira!

Rayon rhum la soirée était intéressante et présentait deux distilleries que l’on voit trop peu souvent passer en dégustation. Montebello souffre souvent de son côté peu médiatique (hormis le blanc Bolokos). Reimonenq lui suit une courbe plus qu’ascendante niveau tarif et le côté « saucé » du profil est très clivant, on aime ou on n’aime pas. Michaël n’a rien trouvé d’extraordinaire mais il a trouvé la gamme Montebello plaisante et il sait maintenant qu’il n’est pas fan du profil Reimonenq. Cédric L lui non plus n’a pas accroché avec Reimonenq et a eu deux jolies découvertes chez Montebello. François a lui un coup de cœur pour le Reimonenq 2012 qui, il est vrai, présente un rapport qualité/prix assez rare. Chacun sera donc reparti avec son coup de cœur et sa déception mais l’essentiel est d’avoir pu comparer ces deux distilleries guadeloupéennes.

On va maintenant s’atteler à la préparation de la prochaine saison, cette soirée concluant la saison 4. Elle a d’ailleurs vu la fameuse tombola de fin de saison se dérouler et faire remporter notamment plus d’une quarantaine de samples et 3 bouteilles. Je dois d’ailleurs remercier les généreux donateurs qui ont fourni les lots! On se retrouve donc, si tout va bien, en octobre pour une soirée autour de Trois Rivières 🙂

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